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Développement de la force et perfection du caractère

Parallèle entre développement de la force et les arts martiaux :

Par Serge Pelletier

Les préceptes qui doivent conduire la pratique et, plus généralement, la vie du karateka sont exposés dans le Dojo Kun. Celui du Shotokan se présente ainsi :

dojo-kun1. Jinkaku kansei ni tsutomuru koto
Cherchez la perfection du caractère
2. Makoto no michi o mamoru koto
Soyez fidèle
3. Doryoku no seishin o yashinau koto
Soyez constant dans l’effort
4. Reigi o omonzuru koto
Respectez les autres
5. Kekki no yuu o imashimuru koto
Retenez toute conduite violente

 

image2Funakoshi Gichin, fondateur du style Shotokan, le résumait en une phrase : « Le but ultime du Karaté-Dô ne réside pas dans la victoire ou dans la défaite, mais dans la perfection du caractère de ses pratiquants »

C’est après plus de 15 années de pratique que j’ai fini par comprendre ce que signifie la « recherche de la perfection du caractère« . Comme tous les adolescents, j’ai commencé à pratiquer le karaté parce que je voulais apprendre à réaliser les prouesses que j’avais vues dans les films de Bruce Lee et de Jean-Claude Van Damme. Et parce que je voulais être une sorte de surhomme invincible dans un combat au corps à corps.

Puis, sans vraiment mettre des mots dessus, j’ai senti que la recherche du geste parfait ou du coup décisif en combat n’était pas une fin en soi. C’est ce sentiment qui m’a maintenu dans une pratique assidue et m’a fait revenir au Karatedo après avoir essayé d’autres arts martiaux (le Wing Chun) ou sports de combat (la Boxe Américaine).

kanazawa

J’ai étudié auprès de maîtres très versés dans le karaté sportif et la compétition, d’autres très rigides et traditionalistes dans leur approche, d’autres enfin qui orientaient totalement leur enseignement vers l’efficacité martiale de l’art du Karatedo.

J’ai assisté à de nombreux stages de hauts gradés et de certains maîtres japonais à la réputation internationale.

Ce n’est finalement que lors d’un stage sous la direction de Kanazawa Hirokazu (10ème dan, vainqueur (avec une main cassée) en 1958 de la toute première compétition de Karatedo au Japon, qui a participé à la fondation et à l’essor de la JKA (Japan Karate Association, maison-mère du Shotokan) dans le monde, avant de fonder la SKIF – Shotokan Karate International Federation) que j’ai compris le concept de la recherche de la perfection du caractère.

Au début de l’échauffement qu’il assurait lui-même, Maître Kanazawa a demandé l’exécution d’un mouvement somme toute assez classique puisqu’il s’agissait de s’accroupir en restant en appui sur les orteils avant de prendre appui d’une  pied, l’autre jambe tendue sur le côté, dans un mouvement d’ouverture de hanche comme ci-dessous

kanazawa-2kanazawa3

Constatant que nombre de stagiaires perdaient l’équilibre dans l’exécution du mouvement, en particulier lorsqu’ils repassaient en appui sur les orteils, le Maître a dit « si vous n’y arrivez pas, il faut que vous travaillez sur ce mouvement chaque matin, au réveil. C’est important : si vous ne maîtrisez pas votre corps, vous ne maîtrisez pas votre esprit« .

Ca a été pour moi comme une révélation. Tout ce travail physique sur la perfection des mouvements n’avait donc pas d’autre objectif que la maîtrise de son corps et, donc, de son esprit. Cette dernière entraîne le contrôle de ses émotions. Elle permet une maîtrise de ses envies et de ne pas leur laisser libre cours de manière inconsidérée. C’est cette maîtrise qui permet de conserver son sang froid et, donc, une aptitude à réaliser des gestes techniques efficaces dans les situations stressantes, qu’il s’agisse d’un coup de bourre au bureau, d’une agression, ou de porter secours à quelqu’un. C’est également elle qui vous permet de manger du brocoli parce que c’est meilleur pour vous qu’un pain au chocolat. Plus généralement, elle vous permet d’avoir le contrôle de votre vie. Et cette sensation de maîtrise est source de bien être intérieur. La boucle est bouclée.

Cette démarche procède initialement du Bouddhisme Zen. Il faut rappeler que les historiens s’accordent pour dire que les arts martiaux d’extrême-orient sont issus d’enchainements physiques enseignés par Boddhidarma (fondateur du Bouddhisme zen) pour préparer ses disciples à la méditation, voire conçus comme méditation à part entière.

Selon cette démarche, c’est donc par le travail physique qu’on accède à un état plénitude mentale… à la perfection du caractère.

Il se trouve que cette transition du physique au mental a été théorisée dans d’autres environnements que ceux des arts martiaux. En particulier, les premiers promoteurs médiatisés en occident du travail de la force ont fait ce parallèle.

Il en est ainsi de Georges Hackenschmidt, lutteur de légende et « old time strong man », qui, après avoir pris sa retraite, a écrit un certain nombre de livres sur les bienfaits de l’exercice et de la culture physique.

Ci-dessous la traduction d’un extrait qui conclut très exactement à l’apport du travail physique sur le mental, le courage, et, donc, à la perfection du caractère.

Il y a donc, dans la démarche du travail de la force, une recherche qui ne se limite pas au développement de cette qualité athlétique pour elle même (comme le karatedo n’est pas que « l’art du coup de poing dans la gueule »). Elle s’étend résolument à une dimension mentale, voire spirituelle. Voilà qui devrait mettre définitivement fin aux préjugés ou aux a priori : les karatekas ne sont pas que des gamins immatures qui veulent faire comme JCVD et les athlètes de force ne sont pas les gros boeufs que le commun des mortels voudraient qu’ils soient.

Au surplus, le développement de la force dans le système StrongFirst passe au premier chef par la perfection du mouvement. C’est exactement la même démarche du Karatedo, et plus généralement, des arts martiaux japonais dans lesquels le développement de l’efficacité d’un coup de poing ou de pied passe par la perfection du mouvement.

Cette communauté de démarche fait du système StrongFirst une préparation physique idoine pour les arts martiaux et les sports de combat.

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Pourquoi devrions nous être forts, par GEORGE HACKENSCHMIDT, dans « Comment vivre en bonne santé et en bonne forme physique« , 1908george-h-feat-bicep-flex-pose

Il est communément admis que la majorité des hommes aujourd’hui sont relativement faibles, alors que le combat pour l’existence de nos jours requiert que nous soyons tous plus forts qu’à une quelconque époque passée !

Le lecteur pourrait penser que la force physique n’est pas nécessaire, mais je vais essayer de démontrer que l’homme ne peut pas réellement jouir de la vie à moins de posséder une constitution saine et puissante.

Selon l’expression d’un médecin célèbre : »Lorsque je reviens sur mes 30 années de pratique professionnelle, je n’ai pas le souvenir de nombreux cas dans lesquels un patient serait tombé malade après avoir exercé son système physique, alors que je me souviens de nombreux cas où ils ont contracté des maladies graves avec un effort mental ou un épuisement du cerveau et leur rémission complète a invariablement été un processus lent et difficile ».

J’en suite arrivé à la conclusion claire que la constitution physique de l’être humain n’est pas faite pour l’étude mais plutôt pour l’exercice manuel et physique. J’ai découvert que ceux qui passent l’essentiel de leur vie à l’extérieur jouissent d’une bonne santé bien plus longtemps que les autres. Ces personnes prennent toujours plaisir à leur repas, souffrent rarement d’indigestion, de maux de tête ou de fatigue nerveuse. L’indigestion est le résultat direct du manque d’efficience du fonctionnement des organes digestifs résultant soit d’une part, d’une suralimentation ou de la consommation d’aliments inappropriés ou de médicaments nocifs, ou, d’autre part, d’un manque d’activité physique.  Quel contraste avec les personnes qui travaillent dans des bureaux ou font exclusivement un travail intellectuel ! ces dernières se plaignent souvent de chaleurs au front, d’avoir les pieds froids, d’une digestion lourde ou de constipation. Peu nombreux sont ceux qui, parmi eux, ne souffrent pas d’une forme d’affection nerveuse. Le sentiment de confort et de bien être leur est pratiquement étranger.

« Nous savons que chaque organe, lorsqu’il réalise sa fonction, requiert une grande quantité de sang et ses veines s’épaississent. De même qu’une plus grande quantité de sang circule au sein d’un muscle lorsqu’il est en activité que lorsqu’il est au repos, il est évident que la même règle s’applique au cerveau. Si plus de sang afflue au cerveau qu’en des circonstances normales, les autres parties du corps s’en trouvent plus ou moins privées. Les pieds et les bras deviennent froids et l’impression est pour le moins inconfortable. J’ai la ferme conviction que viendra un temps où tout le monde admettra la nécessité d’une forme ou d’une autre d’exercice physique quotidien comme la contrepartie normale au travail intellectuel. »

georgeh_3La vie humaine n’est pas très différente d’un établissement commercial. C’est un centre de flux continus. De la même manière que l’établissement commercial périclite lorsque le chiffre d’affaires diminue ou que le stock de marchandises s’accumule sans être vendu, votre corps a besoin de flux continus pour éviter une paralysie de l’activité vitale, partielle ou totale, cette dernière entraînant la mort. De la même manière qu’un établissement commercial connaît le succès lorsque les flux sont en place, un homme se trouvera en bonne santé et son corps fonctionnera mieux si les flux sont fréquents et réguliers.

Cependant, dans la vie, cause et effets intervertissent continuellement leurs rôles. De même que l’homme d’affaires ne doit pas être oisif et doit être actif du petit matin jusqu’au soir, pour permettre à notre merveilleux organisme de conserver un fonctionnement régulier, il doit recevoir un stimulus et être constamment exercé dans toutes ses fonctions. C’est le seul moyen d’éviter la fatigue des organes et de contribuer utilement à leur préservation et à leur renforcement. Vous demanderez ensuite quel niveau vous pouvez atteindre et comment il est possible d’entraîner une telle influence sur l’activité vitale dans son ensemble. Je peux vous apporter la réponse suivante.

Tout mouvement est produit par les muscles. Ceux-ci sont constitués d’un écheveau de chair qui ont la faculté vitale de contraction et de relâchement. Ils sont attachés par des tendons à la structure osseuse dont, par leur contraction, ils modifient la position ou la forme. Le stimulus de ce mouvement est transmis par les nerfs qui ont leur centre dans le cerveau. Les nerfs sont comme des fils reliés à une batterie qui conduisent l’électricité là où est requise. De même, le cerveau envoie l’influx dans tous les muscles qu’il souhaite stimuler au moyen des nerfs. Ainsi, si les muscles sont fréquemment mis en mouvement par notre volonté, leur puissance de contraction et d’exécution des mouvements est, au premier chef, renforcée et ils sont donc amenés à leur développement complet et à la perfection.

Les muscles laissés plus ou moins inactifs perdent leur puissance de contraction et se dégradent naturellement. Cette rétrogradation apparaît sous la forme d’une faiblesse musculaire et de fatigue. Nous observons ces effets le plus souvent chez les gens des classes supérieures. Ils se fatiguent au moindre effort, ont peur du plus léger courant d’air et souffrent souvent d’une faiblesse nerveuse, de rhumatismes ou de catarrhe. Les femmes qui ne pratiquent pas d’activité physique régulière ou dont le métier n’en implique pas sursautent et sont invariablement effrayées par le moindre bruit soudain, comme une porte qui claque. Elles deviennent nerveuse et réagissent souvent exagérément aux événements inattendus de la plus insignifiante nature. De nos jours, ceux qui font régulièrement de l’exercice sont étrangers à toutes ces maladies et désordres, leur système nerveux en retirant force, fermeté et endurance, laquelle constitue l’essence d’une bonne constitution.

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Avec la pression sanguine et l’accumulation de fluide dans le cerveau, l’homme nerveux souffre d’une anxiété continue à propos de son bien être physique. Ses nerfs surexcités lui font craindre d’être atteint de toutes sortes d’affections imaginaires. Une pensée chasse l’autre dans son esprit. A certains moments, il pense être fort et, à d’autres il s’imagine faible et donc malade. Ils est tourmenté par un combat sans fin entre l’espoir de la vie et la peur de la mort. L’espoir échappe inexorablement à son emprise et, finalement, il sombre dans une maladie mentale plus ou moins grave qui peut facilement le conduire à rechercher une échappatoire dans l’auto-destruction.

Le moyen le plus efficace de prévenir les effets indésirables et les conséquences malignes d’un corps peu stimulé est l’entraînement physique méthodique.

L’homme qui a des habitudes sédentaires et un corps faible se trouve pourvu d’un esprit paresseux et manque d’énergie, celui qui poursuit assidument le développement physique en retire non seulement  l’optimisation du fonctionnement de ses organes mais encore une maîtrise approfondie de sa volonté et, consécutivement, un esprit satisfait et facile.

Celui qui met fréquemment sa volonté à l’épreuve en retire un effet sur tous les organes du mouvement qui sont  exercés à réaliser des exploits qui, autrement, auraient été difficiles, douloureux, voire impossibles. Il devient  indépendant et autonome. Il n’est jamais lâche et, lorsqu’un danger réel menace, il est respecté par les autres. La conscience de sa force entraîne une réelle maîtrise de lui-même ; elle produit de l’énergie et du courage, permet de surmonter les épreuves les plus difficiles de la vie et procure de la satisfaction et une vraie joie de vivre. Qui voudrait encore se maintenir dans l’inactivité et la faiblesse ?

 

280px-georg_hackenschmidtD’origine germano-balte et suédoise, Georg Karl Julius Hackenschmidt naît en 1878. Il excelle  notamment en gymnastiqueathlétisme et haltérophilie. Il se lance dans la lutte sous la tutelle du Dr Von Krajewski (conseiller physique du Tsar de Russie). Il remporte le championnat européen à Vienne en 1898, et, la même année, remporte le championnat russe d’haltérophilie. En juin 1900, Hackenschmidt se lance dans le catch. Entre 1900 et 1914, il part en Angleterre pour profiter de l’explosion de popularité que le catch y connaît. Sous la tutelle de son nouveau manager J.C. Cochran, il lance chaque soir des défis au public, mais tous les volontaires échouent à le mettre au tapis. Simultanément, il parcourt le monde et remporte une multitude de championnats, comme le titre mondial de lutte gréco-romaine en 1901. Il resta invaincu jusqu’à sa rencontre avec Frank Gotch, qui le vaincra une première fois le 3 avril 1908 à Chicago. Gotch catchait de façon très nerveuse et rapide et n’hésitait pas à utiliser des techniques parfois peu légales (frappant l’estonien dans le nez), au point qu’Hackenschmidt décida d’abandonner au bout de deux heures et trois minutes de combat. Le match retour entre Gotch et Hackenschmidt se déroula en 1911 à Chicago devant une foule record de 10.000 spectateurs. Mais Hackenschmidt, blessé au genou, se fit battre par deux tombés à zéro par Gotch.

Cette défaite fut pour lui le signal de la retraite. Il partit vivre avec sa femme Rachel en Angleterre et publia plusieurs livres, des traités de philosophie ainsi que des ouvrages sur la condition physique. Hackenschmidt décéda en 1968 à l’âge de 89 ans.